Le physicien italien Guido Vegni est décédé le jeudi 2 juin. Nous perdons un ami, un excellent physicien et un fervent défenseur du programme du CERN.
L’intérêt de Guido pour la physique des particules s’éveille au milieu des années 1950 et ne le quittera plus jamais. En 1956, il rejoint l’équipe de Milan, dirigée par Giuseppe Occhialini, qui travaille avec les émulsions nucléaires comme révélateur. Dans le cadre de sa thèse, il cherche à attribuer une valeur au spin et à la parité du méson K+ en analysant sa désintégration en trois pions. Ses recherches contribuent à l’étude de la célèbre « énigme thêta-tau », finalement résolue lorsqu’est découverte la non-conservation de la parité dans les interactions faibles. La nomination de Guido en tant qu’« assistant » du professeur G. Occhialini en 1960, à Milan, constitue la première étape de sa carrière, qui lui permet de devenir par la suite professeur de physique des particules élémentaires à l’Université de Milan. Il occupera ce poste jusqu’en 2006, année de son départ à la retraite.
Entre 1963 et 1966, en qualité de boursier du CERN, il rejoint l’expérience CERN-École polytechnique de Paris-Orsay-Milan-Saclay, qui utilise la chambre à bulles de 81 cm conçue à Saclay ; il y participe à la découverte du ρ3(1690), également appelé méson g.
À la fin des années 1960, le groupe de Milan construit une cible « active », employée pour la première fois lors d’une expérience réalisée conjointement par le CERN, l’Imperial College de Londres, l’Université de Milan et l’École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ). Celle-ci a pour objectif d’étudier la dissociation diffractive des états mésoniques sur différents types de noyaux. La cible, composée de détecteurs au silicium, mesure l’énergie déposée pour vérifier qu’une réaction a bien eu lieu. Au cours des années 1970, dans le cadre d’une collaboration entre Dubna, Milan et Bologne, Guido prend part à plusieurs expériences auprès de l’accélérateur de Serpukhov, pour lesquelles il utilise un grand spectromètre magnétique. La cible « active » permet l'étude approfondie de plusieurs états, qui sont produits de façon diffractive dans les interactions de 40 GeV/c π- sur des cibles nucléaires. La collaboration parvient ainsi à observer deux états, π(1300) et π(1800), interprétés comme excitations radiales du pion.
Au début des années 1980, cette technique évolue pour devenir un « détecteur de désintégration de beauté », reposant sur un télescope composé de capteurs plans et utilisé dans l’expérience WA71 du CERN. Dès le début de l’ère du LEP, Guido et son groupe rejoignent l’expérience DELPHI et jouent un rôle d’avant-garde dans l’élaboration du détecteur de microvertex au silicium. Guido dirige une équipe qui avait rejoint la collaboration peu après la création de cette dernière. Elle y restera jusqu’à la mise en service de la dernière amélioration, qui permit pour la toute première fois d’intégrer des détecteurs à pixels dans une expérience menée auprès d’un collisionneur.
Après le LEP, il se tourne vers le LHC et se passionne pour l’expérience ATLAS. Il prend la tête du groupe de Milan chargé de la conception et de la construction du détecteur à pixels au silicium d’ATLAS, et s’investit énormément dans ces travaux.
Parallèlement à sa carrière de chercheur, Guido a été un enseignant passionné, et a encouragé un grand nombre d’étudiants à embrasser la carrière de chercheur. Il était convaincu que la qualité de l’enseignement scientifique devait être améliorée dès l’école primaire et a été à l’origine d’une formation très efficace, destinée aux professeurs de physique, reposant sur des outils qui avaient anticipé l’arrivée d'Internet et la révolution des technologies de l’information.
Toutes nos pensées vont à son épouse Anita, à ses filles Isabella et Giulia et à son fils Ferdinando, ainsi qu’à leurs familles.
Guido nous manquera à tous terriblement.
Ses amis et collègues.