NA63
L’expérience NA63 étudie les processus de rayonnement dans des champs magnétiques élevés
L’expérience NA63 dirige des faisceaux d’électrons et de positons sur différentes cibles pour étudier les processus de rayonnement dans de forts champs électromagnétiques. Ces recherches sont utiles pour un large éventail de domaines de la physique, notamment les effets faisceau-faisceau dans les collisionneurs linéaires, et la physique de divers phénomènes astrophysiques.
L’expérience est installée dans la zone Nord du CERN. À cet endroit, le faisceau de protons de haute énergie du Supersynchrotron à protons (SPS) se divise en lignes de faisceaux secondaires qui fournissent différentes particules aux expériences. L’une de ces lignes de faisceaux secondaires, H4, produit sur demande des protons, des hadrons, des électrons ou des muons.
Champs critiques
À NA63, les faisceaux d’électrons provenant de la ligne H4 sont dirigés sur des cibles de divers éléments, allant du silicium, relativement léger, au tungstène, à l’or et au plomb, en passant par le fer et l’étain, tous beaucoup plus denses. Certaines cibles sont amorphes, d’autres sont des monocristaux. Lorsqu’ils frappent les cibles, les électrons provoquent des gerbes de nouvelles particules, qui émergent de l’autre côté des cibles. Les particules qui traversent les cristaux-cibles subissent un champ électromagnétique très fort, proche du « champ critique » théorique.
Dans un champ critique, l’incertitude sur la position des électrons peut entraîner un gain d’énergie suffisant pour produire de nouvelles particules à partir du vide. Habituellement, de tels champs ne se manifestent que lors de phénomènes astrophysiques, par exemple, dans des étoiles à neutrons au fort champ magnétique ou dans des trous noirs (au puissant champ gravitationnel) et, éventuellement, dans les accélérateurs cosmiques propulsant les rayons cosmiques aux plus hautes énergies connues. À travers une méthode spéciale, faisant appel à des cibles en cristaux et à des faisceaux énergétiques, NA63 a réussi à tester certains phénomènes en laboratoire dans des champs magnétiques proches du « champ critique ».
Délai d’émission
NA63 étudie aussi l’influence des champs électromagnétiques puissants sur le délai d’émission des photons. En particulier, il est intéressant de constater que, pour des valeurs critiques, l’ampleur du champ influe sur le temps que met un électron à émettre un photon.
Un électron est dévié en pénétrant dans un champ magnétique et perd ainsi une partie de son énergie en rayonnement, sous la forme d’un photon. En s’appuyant sur les phénomènes de la relativité que sont la dilatation du temps et la contraction des longueurs, l'expérience NA63 a montré que le processus d'émission des photons n'est pas instantané, mais prend du temps. C’est pour cette raison qu’il peut faire l’objet d’expériences.
Dans un champ électromagnétique critique, par exemple, les électrons sont déviés si violemment qu’ils n’ont pas le temps de rayonner des photons. Ainsi, en réglant le champ électromagnétique au-delà du seuil critique, il est possible de modifier le spectre de rayonnement d’un faisceau d’électrons : il suffit d’augmenter le champ électromagnétique pour que l’intensité relative du rayonnement produit par le faisceau diminue. NA63 étudie ces effets, qui pourraient mener vers de nouvelles sources de rayonnements, voire même vers un effet laser à des énergies de photons très élevées.
Les effets des champs magnétiques intenses et du retard de l’émission sont intéressants pour de nombreuses autres branches de la physique, allant du « mode bulle » des champs de sillage dans les plasmas servant à accélérer des particules sous des gradients extrêmement élevés, aux lasers intenses et aux collisions d’ions lourds, en passant par des objets astrophysiques comme les magnétoiles (des étoiles à neutrons fortement magnétisées). Les concepts étudiés à NA63 s’appliquent même à un analogue gravitationnel – le rayonnement de Hawking des trous noirs – qui n’a toujours pas été prouvé.